On supposerait spontanément que ces unités correspondent à chaque mot. Mais cette hypothèse ne fonctionne pas, car les mots sont prononcés, dans presque toutes les langues, de façon fluide et les uns après les autres. Les lettres elles-mêmes ne constituent pas une unité appropriée puisqu'elles peuvent être prononcées différemment selon le mot et l'intonation. Autres complications dans la compréhension de la parole : les différentes hauteurs de son selon l'humeur et le registre de la personne, les accents, les dialectes et la vitesse variable de la prononciation. Tous ces facteurs influencent grandement le son des paroles prononcées, si bien que d'une personne à l'autre, on peut avoir des modèles très différents, même si la phrase prononcée est exactement la même.
Pourtant, notre cerveau semble parvenir à l'interprétation de la parole presque sans effort, et ce, à un rythme effréné. Le fait est qu'à une vitesse normale, nous recevons jusqu'à 14 signaux de parole par seconde. Le plus surprenant, c'est que si la vitesse augmente à 60 signaux par seconde, le contenu nous apparaît encore plus compréhensible.
Même les technologies numériques les plus modernes ne peuvent rivaliser. À l'heure actuelle, aucun programme de reconnaissance vocale n'est en mesure de reconnaître des paroles dictées, de façon aussi fiable et rapide qu'un humain.
Et c'est notre voix que nous entendons le plus fort
Pour que notre conscience se concentre sur l'essentiel, le centre de l'audition de notre cerveau possède la faculté de différencier les bruits importants des sons qui le sont moins ou de concentrer notre attention sur quelque chose de particulier, par exemple sur un interlocuteur. Comme l'a démontré une étude américaine, cette faculté fonctionne en augmentant ou en diminuant l'activité dans des zones spécifiques de notre centre de l'audition quand nous écoutons ou parlons. Et quand nous parlons, il se produit quelque chose de surprenant : Même avec un brouhaha causé par d'autres personnes ou un environnement bruyant, nous entendons notre propre voix suffisamment fort (ce qui est nécessaire pour nous adapter de façon dynamique aux conditions environnantes). Notre cerveau fait donc en sorte que nous nous entendions parler suffisamment fort.
Le centre de l'audition : petit, mais surprenant
Mais où se cache donc ce miraculeux centre de l'audition, qui réalise toutes ces prouesses de jour comme de nuit ? Et quelle taille fait-il ? La réponse est tout simplement incroyable : le cortex auditif (c'est ainsi qu'on l'appelle) n'est pas plus gros que l'ongle du pouce et « se terre » dans les méandres du cortex cérébral. En réalité, nous disposons de deux centres de l'audition, un dans l'hémisphère gauche et l'autre dans l'hémisphère droit. Chacun se compose de onze « champs auditifs » qui, une fois associés, permettent de comprendre une large gamme de fréquences sonores. De nouvelles expériences démontrent qu'il existe une certaine répartition du travail entre les deux centres de l'audition. À titre d'exemple, le cortex auditif gauche joue un rôle crucial dans l'interprétation, soit la reconnaissance, des signaux acoustiques. Les scientifiques ont également pu mettre au jour qu'un échange intense et permanent existe entre les deux hémisphères.
Les sens collaborent
Non seulement les deux centres de l'audition communiquent dans notre cerveau, mais tous nos sens sont également liés les uns aux autres, y compris l'ouïe et la vue. C'est ce que des études ont démontré, chaque individu dispose de la faculté naturelle de lire sur les lèvres. Dès que l'on voit des mouvements de lèvres, provoqués par des paroles, notre centre de l'audition s'active, même quand il plane le silence le plus complet. Nous pouvons tous nous rappeler d'une expérience similaire : nous comprenons mieux ce que quelqu'un dit, lorsqu'on le voit le dire. D'autres moyens de communication entre humains, comme les grimaces, laissent le cortex cérébral totalement de marbre.
Acouphènes : soliloque des cellules nerveuses
La capacité étonnante et indispensable de notre centre de l'audition à isoler et à amplifier les sons pertinents peut également se retourner contre nous. Comme le supposent les scientifiques, c'est le même mécanisme qui se cache derrière l'apparition d'acouphène. Concrètement, lorsque certaines fréquences sont de moins en moins perçues par le centre de l'audition en raison d'une perte de la capacité auditive (souvent liée à l'âge), ces fréquences sont « amplifiées », même quand elles ne sont pas réellement entendues. Ainsi, un son est généré dans le cerveau, sans qu'il existe. Les acouphènes ne se manifestent donc pas à cause d'une déficience de l'oreille, mais plutôt du fait de modifications dans le cerveau. Certains experts qualifient les bourdonnements d'oreilles comme le « soliloque des cellules nerveuses ».
Il faut entraîner son audition
Les personnes souffrant d'une diminution de l'audition ont bien souvent des difficultés à comprendre des paroles prononcées dans des environnements bruyants. La raison : avec une capacité auditive diminuée, un aspect important du traitement central de l'audition est également impacté dans le cerveau : la « fonction de filtre ». Bonne nouvelle : un entraînement de l'ouïe spécialement développé, associé à des systèmes auditifs dernier cri, peut apporter une amélioration significative en remettant en route le filtre auditif « à l'arrêt » dans le cerveau.